"Une musique des sphères"
La nuit, tout semble suspendu. L'immobilité majestueuse
de la voûte céleste nous subjugue. Elle nous rappelle que
la nature n'est pas seulement le vivant que nous pouvons
prendre dans notre main, des animaux que nous habillons
de nos mythes ou un écho du Paradis, mais aussi une
immensité qui nous dépasse, que nous ne pouvons
approcher, dont les secrets nous tiennent à distance.
L’homme a toujours eu conscience de sa petitesse face à
l’univers que l'obscurité dévoile. Il a toujours cherché à en
percer le sens.
On imagina le ciel –parfait oeuvre divin- régi par de justes
proportions, des rapports de nombres comme ceux qui
existaient entre la hauteur des sons et la longueur des
cordes les produisant et qui fascinaient les savants.
Le cercle, signature de la trajectoire des astres, fit naître
l’idée que ceux-ci s’organisaient entre eux selon un rythme
régulier propre à produire des sons magnifiques et
magiques. On se mit à enseigner la «Musique des sphères»,
terme apparu clairement pour la première fois sous la
plume de Kepler.
Les compositeurs de la Renaissance s’engagèrent dans cette
quête de la musique universelle rapprochant l’homme de
l’univers, le microcosme du macrocosme.
Grâce à une maîtrise accrue du contrepoint, ils
élaborèrent des systèmes musicaux de plus en plus
complexes, jouant avec les proportions, les mesures, les
modes. Le canon est resté le vecteur le plus utilisé car il
permettait de se rapprocher par des rapports numériques
«simples» ( unisson, tierce, quarte, quinte, octave, …) de
nombres «simples» qui semblaient parcourir le ciel.
Ce programme est une combinaison d'oeuvres qui sonnent comme un ciel d'été.. Myriades sonores, dont la richesse et la complexité nous subjuguent et dont se dégage pourtant une impression de limpidité, d'harmonie globale, d'architecture infinie.
Les oeuvres ne sont pas données intégralement. L'oreille se tourne chaque fois vers une nouvelle constellation.
La Missa Prolationum de Johannes Ockeghem représente une prouesse d’architecture musicale. Elle combine l’utilisation simultanée des quatre prolations (mode de division de la semibrève et même de la brève) et l’emploi constant du canon. La messe étant écrite à 4 voix, chacune d’elle illustre une de ces possibilités (division parfaite : par 3 de la brève/ imparfaite : par 2 de la semi-brève. Division imparfaite de la brève/ parfaite de la semi-brève. Division parfaite des deux…). Les voix sont combinées deux à deux par leur prolation et de plus imbriquées entre elles selon un système de double canon qui parcourt toute l’oeuvre.
Dans les motets et messes de Josquin des Prés, la construction s’avère aussi subtile mais peut-être moins intellectuelle. La Missa « La sol fa re mi » utilise un thème mélodique simple, traité intégralement comme un motif obstiné, autour duquel se combinent les autres voix.
La Messe L’Homme armé de Pierre De La Rue offre quant à elle un des plus beaux exemples d’utilisation simultanée des proportions. Le deuxième Agnus étant bâti en canon à quatre parties
totalement indépendantes, chacune d’entre-elles possédant son propre signe de mensuration, la
polyphonie ainsi créée atteignant une sorte d’immatérialité ou d’inconnu sonore.
La science d'alors met en évidence l'incohérence des textes bibliques. Les observations que permet la nouvelle lunette astronomique provoquent des polémiques. Avec la publication de "De
revolutionibus orbium coelestium" (Sur les Révolutions des Sphères Célestes) par l'astronome
polonais Nicolas Copernic en 1543, le soleil détrône la Terre et s'installe au centre du cosmos. Le
monde ne sera plus jamais comme avant et pourtant toujours aussi stupéfiant quand par les belles
nuits d'été le ciel est dégagé.
C'est pourquoi nous avons choisi d'enrichir notre parcours musical de ces écrits, anciens et nouveaux, tous témoignages –au risque du sacrilèges - de la fascination inextinguible des hommes
pour la nature céleste.
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Josquin Des Prés, Johannes Ockeghem, Pierre De La Rue
Extraits des Messes "la sol fa re mi, Prolationum, l’Homme armé"
Andreas de Silva, Brunet, Josquin Motets
Textes extaits de l’ancien testament et des écrits de Copernic et Kepler
Nathalie Marec, Julie Robard-Gendre Sopranos
Sophie Toussaint, Jean-Christophe Clair Contraltos
Bruno Boterf, Hugues Primard, Vincent Bouchot, Olivier Guérinel Ténors
François Fauché, Jean-Michel Durang Basses
Direction : Bruno Boterf
Benjamin Lazar récitant
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